Vienne ce jour de la fin du monde,
Avec vous, mon amour.
A seize heures précises ce jour-là
L’horloge s’arrêtera à jamais.
Nos âmes sourdes aux trompes illusoires
Qui n’appelaient à rien autre que le bruit,
Feront taire la cacophonie du silence brisé en éclats sonores.
Toutes voix perverses de rondes enfantines,
Fausses, comme l’innocence proclamée,
S’éteindront brusquement au seuil inabordable de ton sépulcre d’or.
Et, seule d’entre toutes, ma voix s’élèvera car je t’appellerai.
Par-delà le chaos des hommes effondrés en leurs funestes œuvres,
Par-delà les furies de leurs femmes sur eux et leurs séquelles criardes,
Je t’appellerai et te relèverai de ce fauteuil d’attente, ô ombre,
Ô ma plus belle ombre, sacrée, choisie, élue, et venue !
Les éruptions cutanées de la Terre crachant le feu aux cieux noircis
Les magmas grouillant de pierres, les déluges fulgurant de matières,
Ô Terre disloquée, en finiront avec l’humain jusque dans ses tanières
Où, perdu, toujours il persiste et espère, mains jointes et front baissé
Flammes, brasiers, la lumière comme un autre soleil,
Consument toutes choses consumables, sous les yeux des étoiles
Qui dansent une pulsation désordonnée
Et dans la commotion sidérale plongent sans un regret.
Enfin, l’eau ! L’eau qui a pouvoir sur tout, recouvre cendres et ruines,
Epaves et squelettes, se pare des fumées du brouillard luminescent
Dont les paillettes d’argent nous font habits de fête,
Les longues éoliennes brisées sur le parvis du vent
Gémissent leur dernier souffle tandis que Dieu, sous le limon,
Se dissout atomes après atomes dans le néant.
Désormais nous allons par le bonheur des vagues sur la terre abolie.
Sur la mer infinie, nulle arche à l’horizon, nul continent, nul écueil
Et il n’y a plus d’îles ; nous allons et tout est fini.
Tu es morte.
Et tu vas au gré de nos pas sur cette flaque immense qui roule dans la paix.
Je suis mort.
Et je suis près de vous, fier de votre beauté à mon bras.
De l’orgueil à votre sourire perché depuis que nous avons franchi le seuil ombreux,
De la liberté de n’être plus rien, ni renaissant, ni début, ni ébauche
Ni commencement, ni aurore, ni crépuscule, ni souvenir.
Rien, parmi les galaxies mouvantes, lasses et constellées.
Gilbert Provaux – Août 2022
Magnifique et tempétueuse vision d'une fin du monde cataclysmique, comme il se doit et de ta fin physique, debout et droit, au bras d'une belle et classieuse Femme, dont on imagine les traits, si l'on te connais. Une question se pose alors, la fin du monde est-elle une conséquence de ta mort, ou bien elle ne peut advenir que si tu meurs ? La fin du monde coïnciderait-elle avec ta propre disparition ? A débattre...En tous cas et comme chaque fois : du très bon à lire !