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"MARE NOSTRUM"



Je suis tout ruisselant de Méditerranée....


Franck Frazetta
Franck Frazetta




Eternellement naissant

Sous les voiles latines et les chants mystérieux des rivages.







Les peuples Eoliens m’ont fait oiseau un temps, des plumes sur mes épaules, collées de cire épaisse et je volais trois jours près du char de Phoëbus.

Et, dans l’Egée, tombais le quatrième comme déchoit un ange foudroyé par sa faute, percé entre les côtes.



Jan Carel Van Eyck
Jan Carel Van Eyck


Mais sur la plage où je roulais, sous le torse noueux d’un olivier, l’aurore aux fines mains souffla sur mes blessures. Je vis, comme je vous vois, le casque d’or d’Athéna posé près de ma tête. Je la vis Elle-même la Déesse entre toutes, qu’avant toutes j’adore, m’accompagner un peu. Poséïdon, là-bas, ramenait ses chevaux.


Et je roulais encore. A la mer ! A la mer ! Où sont les galères Barbaresques…

Ô marins, ô voleurs ! Princes marchands d’esclaves, friands d’algèbre et de sultanes, avant que n’ai vécu Grenade !


Je pris aux Perses le tapis de Sherazadhe, volant sur les zéphyrs, dans l’air chaud parfumé des nuits ravies au Pacha endormi, traçant entre les minarets, dont l’élégance me brisa, les obscures arabesques que les lamentations des prières du Vizir ne dénouèrent pas. Je versai des larmes exaspérées sur la splendeur de Byzance aux coupoles bleutées. Je survolais le Pont et répondis « Damas » à qui m’interrogeait d’un cri d’étonnement. C’est là exactement que périt devant Dieu un scribe du Désert, qui en avait reçu un livre incandescent, déchiré avec lui aux dents de l’Univers.





Ma fortune se fit ainsi. J’ai tout vu sans comprendre. N’importe ! Je vais bien, quand tout, à l’agonie, se vautre dans l’espérance criarde des apôtres.


Ainsi je fus à Rome. L’étincelle ne vint pas, nul ne vit, sur la Judée, l’étoile des Rois Mages. Jésus le charpentier construisit pour Pilate, son ami, un palais formidable au mont du Golgotha. Ils firent livrer du vin, venir de belles femmes et la fête n’eût pas de fin.


Et j’allais dire à Rome, au fantasque César, ce que je dis un jour à l’austère Tibère : défiez-vous des croix, ce ne sont que des signes. Ecoutez à vos portes, le flot cogne, il inonde vos caves, il porta vos guerriers, ramena vos esclaves, illumina les yeux des gaulois mercenaires.

C’est la mer, notre mer ! Chargée du sel de nos défis, emplie des bruits de nos désastres, qui nous avale et nous recrache, autre semblable, sous l’azur tendu des terrasses.


William Turner

Gilbert Provaux

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1 Comment


christian.provaux
christian.provaux
Mar 03, 2020

A tes mots on te dirait marin, ou quelque chose d'équivalent. Présence prégnance de la mer et de ses remugles dans tes vers. C'est étonnant, mais pas vraiment surprenant au bout du compte, lorsque l'on te connait. C'est bien en tous cas, même pour moi les pieds plantés sur la terre ferme. On y rencontre toutes sortes de personnages de l'histoire et des histoires que l'on pourrait presque chanter, comme le faisait Ferré. Si je m'écoutais, j'entendrai ma voix, crier, non ?

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