Heureux les hommes droits
Les forts que l’orgueil élève
Des ventres solaires de femmes hautaines
Belles comme la foi des Simples
Pour les offrir à la vie mortelle
Heureux le mortel supplice de l’amour
Le cœur percé qui saigne à la fontaine
Le sang royal, l’eau de vie du baptême
Heureux les Rois
Solitaires sur leurs chars à la Course
Qui arrachent à Dieu, usurpateur suprême,
Sa couronne d’Etre et son trône indécent
S’en couronnent eux-mêmes et frappent de stupeur
Les peuples en vertige
Heureux les Vivants
Dont la chair musculeuse
Libérée par le maillet et la pointerolle
D’un Ange renaissant
Rayonne d’abondance
Heureux les Négateurs
Dont le rire éclatant
De nos obscurs desseins
Adoucit la douleur
Heureux les Chevaliers
De la Triste Figure
Qui savent tous les noms
Des moulins qu’ils affrontent
Heureux les Justes
Les Robespierre et les Saint-Just
Les purs, les incorruptibles
Qui font geindre les médiocres
Trembler les imbéciles, transpirer les lâches
Heureux les Désespérés
Aux lugubres passions
Escrimeurs fines lames des causes perdues
Que redoutent, assis, les sournois et les veules
Dressés, les chiens de toute meute
Heureuse l’Emeraude
Au front de l’Effronté
Qui toujours illumine
Des femmes que j’aimai
Les yeux extravagants
Heureuses les Reines
Qui tiennent en leur fourreau
Les armes d’obsidienne
Pour les Grand Soirs furieux
Heureuses Celles-là
Qui hantent des poètes
Les songes voluptueux
Et ne les quittent pas
Heureuse La Mort
Inéluctable Mort
Misérable et sublime
Squelette décisif sous la pèlerine
En moi, qui supporte mes chairs
Ame véritable de moelle et d’os
Mortelle comme moi
En vérité je vous le dis :
Heureux les hommes droits
Heureux le mortel supplice
Heureux les Rois
Heureux les Vivants
Heureux les Négateurs
Heureux les Chevaliers
Heureux les Justes
Heureux les Désespérés
Heureuse l’Emeraude
Heureuses les Reines
Heureuses Celles-là
Heureuse La Mort
Tout est là.
Gilbert Provaux
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