Au bout de mes doigts, la Ville Engloutie.
Mes paupières se sont soulevées pour la première fois ici, dans la mer.
Et d’Ostie la vague décuplée a pris Rome en son ventre et s’est couchée sur Elle pour la garder.Mes oreilles sont sourdes, ma tête pleine d’eau.
Ma bouche bée idiote ne sait pas dire un mot, une parole en bulles, rien, pas un sanglot.
Donc, je ne suis pas là.
Pourtant je ruisselle.
Je m’écoule en ce liquide qui m’immerge ; j’ai froid, j’ai chaud, dans les courants changeants, les thermes où frétille le banc éperdu des sirènes.
La noyade n’est pas la mort. Les marins n’en sont pas revenus, n’en reviennent jamais.
Odysseus non plus qui fit croire en son retour.
Je me livre aux ultramarines confidences.
L’ouie cernée d’algues gobe le son brut à l’abri des collines submergées.
Venise flotte encore là haut, usée, pourrie, gorgée d’eau saumâtre, où vont je ne sais quelles amours prononcer je ne sais quels vœux.
Au-dessous, aux abysses, aux souveraines allées sablonneuses,
mon corps divague par gestes langoureux,
libéré des mots qu’il oublia pour ne plus avoir à dire.
Ys
AtlantYs
Se trouvent là.
Belles jumelées, innées, désertes, comme l’aristocratie dernière des Citées hautaines où personne ne va s’il ne vient d’Orgueil, pauvre et souverain.
Antinea me vient.
Je la rencontre et la connais tôt, dans l’infini des nuits marines.
J’aime Antinea en son royaume dont je ne reviens pas.
J’aime la rumeur du sel et l’or dans l’œil du requin, la faveur des éponges pour mon âme latente, l’épopée des épaves au bal des crustacés.
Gilbert Provaux
Un texte à la marée, une pêche à pied, le goût des algues. Visiblement L'Atlantide te tente et particulièrement la galerie des figés. Alan Stivell y croit encore lui, j'en suis sur !